Le procès en corruption de F. Le Bohellec ajourné à Décembre
Il s'agit de l'attribution de la Halle des sports Colette Besson

Ce matin 16 mai 2024 était convoqué le procès pour corruption de Franck le Bohellec, suite à un signalement à la procureure de la République au titre de l’article 40 du Code de procédure pénale. Signalement  de Natalie Gandais, datant de… janvier 2016 ! Étaient également accusés :

– le directeur de l’urbanisme de la mandature de Mme Cordillot que F. le Bohellec a promu Directeur Général Adjoint,

– son maire adjoint aux sports Michel Monin,

– ainsi que l’architecte M. Tougeron et le promoteur Demathieu et Bard.

L’opération de corruption aurait eu lieu à propos de l’attribution de la future Halle des sports Colette Besson. Il s’agit d’un procès pénal , devant le tribual correctionnel, et non devant un tribunal administratif. C’est-à-dire que les accusés le sont pour des délits personnels, et non pour des « fautes de service » (contrairement aux « affaires» où F. le Bohellec a déjà été condamné par la justice en tant que maire). Bien sûr ce sont leurs positions officielles qui leur ont permis de prendre une décision en faveur de l’architecte et du promoteur, en échange, selon l’accusation, d’avantages financiers reçus à titre privé. Rappelons que jusqu’au jugement ils sont présumés innocents…

Si Natalie Gandais avait dès 2016 présenté à la Brigade financière de la Préfecture de Police toutes les preuves du délit de « favoritisme » (c’est-à-dire d’un choix truqué en faveur de Tougeron, Demathieu et Bard) , il semble que la police ait pris du temps pour détecter les contreparties, matière du délit de corruption (on dit aujourd’hui : « prise illégale d’intérêt ») . En réalité, comme l’a appris Natalie Gandais dès janvier 2023 (alors qu’elle témoignait pour l’une des autres affaires Le Bohellec qu’elle avait signalé au titre de l’article 40) , les contreparties avaient été détectées  par la police dès octobre 2022 au moins, où MM Le Bohellec, Monin et le directeur de l’urbanisme (un temps resté DGA du nouveau maire P. Garzon)  furent placés en garde-à-vue.

Dans le public, ce matin à Créteil : ce qui reste des amis politiques de M. Le Bohellec, ainsi que M. Philippe Vidal pour « Place Publique » (le parti de R. Glucksmann) et votre serviteur pour Les Écologistes.

La présidente lit l’acte d’accusation. Ce qui me frappe c’est que, pour une corruption ayant couté des millions à leur concitoyens, les 3 accusés de corromption auraient reçu moins de 100 000 euros. Pas cher payé de la part de D&B ! C’est du moins ce que l’instruction a retenu comme « prouvé » par l’enquête de la police. F. le Bohellec aurait reçu la plus petite part (7500 euros), le directeur de l’urbanisme aurait reçu la plus grosse  la plus grosse (48000 euros pour « aide aux associations », c’est à dire sans doute pour financer le soutien électoral à F. le Bohellec dans les quartiers de Villejuif), M. Monin 18000 euros pour son club de golf.

Promoteur et architecte demandent le report, mais pas F. le Bohellec qui n’a pas intérêt à ce que son procès et l’éventuel procès en appel soient proches de sa future campagne municipale, en mars 2026. La juge reporte au 11 décembre 2024. Comment en est-on arivé là ?

Résumé des chapitres précédents.

  1. Comment Natalie Gandais a levé le lièvre…

Lors de la campagne municipale de 2014, les écologistes regroupés sur la liste « L’avenir à Villejuif » constatent au porte-à-porte, en particulier dans les quartiers populaires, la vive opposition de la population à l’équipe sortante d’Union de la gauche de Mme Cordillot. Les électeurs/trices nous demandent de faire une alliance de toutes les oppositions, hors FN, ce que nous acceptons et déclarons publiquement. Une dissidence socialiste autour de Philippe Vidal fait de même. Le premier tour confirme le constat : l’Union de la Gauche (PCF+PS+PdG+MRC+PRG +…) n’obtient que 32,7%. Malheureusement la liste LR de F. le Bohellec arrive en tête des oppositions et, conformément à nos promesses, nous fusionnons pour le second tour. Les Villejuifois.es nous accordent une large majorité. Selon nos calculs il existe en fait, dans le conseil municipal élu, une majorité alternative, avec la gauche et la liste Vidal si les choses tournent mal avec le maire le Bohellec. Forts de cette garantie, nous acceptons donc de participer à l’exécutif. Natalie Gandais est première adjointe, en charge de l’urbanisme, du logement et du patrimoine immobilier municipal. Les choses se passent relativement bien pendant un an, Nous révisons le PLU pour le dédensifier, nous obtenons enfin de l’ANRU la rénovation urbaine du quartier Lamartine (le PCF de Villejuif vote contre en Conseil d’Agglomération, à la stupéfaction des communistes des autres villes qui votent pour, le PS vote pour, F. le Bohellec se réfugie ans une absence prudente), l’Économie sociale et solidaire se développe puissamment, etc.

Mais un jour MM Monin et le directeur de l’urbanisme viennent trouver Natalie Gandais et lui proposent un « magnifique projet » : vendre un terrain municipal, derrière le réfectoire Karl Marx, au promoteur Demathieu et Bard, qui construira une résidence de 150 logements et qui recèdera à la Ville un gymnase sous forme d’une coque nue. Le bénéfice de la vente du terrain couvrirait le prix de l’aménagement de la coque. Ainsi Villejuif échangerait ce terrain contre un gymnase équipé de neuf (la future Halle des sports Colette Besson) sans dépenser ni gagner un centime.

Natalie Gandais approuve l’idée mais demande qu’elle fasse l’objet d’un concours. Elle retrouve par ailleurs dans les archives de la mandature Cordillot le même projet, même plan, même montage financier, même architecte (Tougeron, habitué des édifices publics villejuifois) mais pour un autre promoteur. Après bien des réticences, MM le Bohellec et le directeur de l’urbanisme lui proposent la procédure de « dialogue compétitif » où les candidats retenus peuvent faire trois offres successives. À la réunion de préparation de l’appel d’offre, Demathieu et Bard est invité comme expert (alors qu’il sera candidat !) et le directeur de l’urbanisme déclare : « Il n’y aura pas de compte-rendu de cette réunion ».

Dès la première offre, un autre candidat, la Sogeprom, propose un projet plus avantageux :

  • financièrement : gain de plus de 2  millions pour la ville, et prix du m2 de plancher inférieur pour les acheteurs
  • techniquement : le gymnase Tougeron/ Demathieu et Bard est demi-enterré avec le vestiaire au sous-sol, le projet Sogeprom est de plein pied avec le stade, ce qui permet l’évacuation immédiate des spectateurs en cas d’accident et dispense d’un système de pompes pour le vestiaire.

Mais au 2e et 3e tour, D&B propose sytématiquemet un prix du terrain légèrement plus élevé que Sogeprom, ce qui indique qu’un informateur lui communique l’offre de son concurrent. Et M.Monin explique que le projet Sogeprom est trop lumineux et que « ça gênera les joueurs »…

Mais n’a pu empêcher le lièvre de courir

Voyant la manœuvre, Natalie Gandais expose au maire ses soupçons et qu’il conviendrait d’en aviser la Procureure de la République comme l’article 40 du Code de procédure pénale en fait obligation. F. le Bohellec lui répond que, si elle fait ça, elle sera destituée. Dès que le marché est attribué à D&B , N. Gandais envoie à la Procureure son signalement et porte plainte pour chantage dans un but d’entrave à la justice. Elle est rapidement convoquée par le pôle financier de Préfecture de Police, emporte avec elle une valise de preuves, que les policiers passent deux jours à examiner. Ils concluent « Le délit de favoritisme est évident, il faut voir maintenant s’il y a une contrepartie constitutive du délit de corruption ».

Le maire annonce que N. Gandais sera destituée au prochain conseil municipal. N. Gandais et notre groupe comptons sur le soutien des oppositions de gauche et du groupe de P. Vidal, plus une partie du groupe UDI (qui lui déclare « On n’a pas été éleu.es pour ça ») pour mettre le maire en minorité et entamer une procédure de destitution. Elle invite tout.es les élues à venir consulter la valise de documents qu’elle a présenté à la police. Mais à notre surprise aucun ne la soutient en Conseil municipal. Au nom du PS, renversant la jurisprudence Mitterrand, un élu déclare « Ce n’est pas au mis en cause de démissionner, mais à la personne qui signale son délit de partir, et à toutes jambes. » Mme Cordillot interdit aux élu.es PCF de consulter les documents. N. Gandais est destituée de son poste de maire adjointe, les écologistes quittent en bloc la majorité, démissionnant de leurs postes de maires-adjoint.es.

Il faudra de longs mois avant que, l’un après l’autre, les groupes de gauche rejoignent les écologistes dans la suite de leur combat sur cette affaire, le signal étant donné par Sophie Taillé-Polian qui finit par déclarer « Il y a quand même des documents… ». Car il y aura de nouveaux rebondissements dont on peut trouver la chronique sur le site L’Avenir à Villejuif. Mais F. le Bohellec parvient toujours à acheter quelques élu.es des différents groupes en leur offrant des postes de maire-adjoint (rémunérés) et ce n’est qu’à la fn de son mandat qu’il se retrouvera minoritaire, administrant les affaires courantes sous le controle de la nouvelle majorité « gauche plus écologistes », qui emportera l’élection de 2020.

  1. Rebondissements

Le problème de Demathieu et Bard est que le dialogue compétitif et la concurrence de Sogeprom l’ont obligé à acheter le terrain à la Ville plus cher que prévu. Il doit donc se rattraper.

Le projet est présenté par le maire aux Villejuifois en réunion publique. Les « slides » défilent à toute vitesse sur l’écran, mais N. Gandais repère d’un coup d’œil sur une image du projet une bizarrerie : il semble que la résidence fasse 8 étages et non 7 comme l’y oblige le PLU. Nous prenons rapidement une photo. Vérification faite, c’est toute l’image du contexte (le stade K. Marx, le réfectoire) qui a éta faussée pour masquer la manœuvre au Monuments historiques. Et on vérifie sur le permis de construire qu’un étage a bien été subrepricement rajouté. N. Gandais fait un nouveau signalement, D&B riposte en la menaçant de plainte pour dénonciation calomnieuse, mais les services de la Ville, voyant la faute indéfendable, annulent le permis de construire, qui est « rectifié » à 7 étages.

Tres vite le projet Tougeron s’enlise… dans la nappe phréatique. Il faut remonter le gymnase vers la surface… reprenant en somme l’idée du projet Sogeprom, sans aller jusqu’au bout de sa logique ; un gymnase de plein-pied avec le stade.

Mais imperturbablement la construction avance, jusqu’à son inauguration. Les premiers acheteurs des logements, comme les services de la Ville maintennt dirigée par la coalistion de la gauche et des écologistes, constateront des malfaçons et pour la Ville des surcoûts…

Le temps passe et malgré le travail de la police la justice ne fait rien (probablement monopolisée par la lutte contre les trafics de drogue). Croyant en son impunité, F. le Bohellec multiplie les embardées dans l’illégalité, déclanchant de nouveaux signalements dont l’instruction est toujour en cours.

Mais ce sont d’autres histoires à venir…

Alain Lipietz

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